Introduction
Seize années… telle est la durée de l’attente imposée par Katsuhiro Ôtomo à ses fans pour que ces derniers puissent savourer à nouveau le talent de l’auteur d’Akira. Certes, Ôtomo a participé à la réalisation de bon nombre d’œuvres dans la dernière décennie (Memories, Perfect Blue ou encore Metropolis), mais ce n’est qu’en 2004 que l’auteur réalise une œuvre de son cru : Steamboy.
Fiche Technique
Type : Long métrage
Durée : 2h11
Scénario : Katsuhiro Ôtomo et Sadayuki Murai
Réalisation : Katsuhiro Ôtomo
Décors : Shinji Kimura
Musiques : Steve Jablonsky
Site officiel : http://www.steamboy.net
Synopsis
En 1851, au beau milieu de l’Angleterre Victorienne, la communauté scientifique est en effervescence à l’approche de l’Exposition Universelle de Londres. A cette occasion, les professeurs Lloyd et Eddy Steam, respectivement père et fils, ont conçu une mystérieuse tour dont le fonctionnement repose sur trois ballons à vapeur révolutionnaires. Ayant des divergences d’opinions quant à la finalité de ladite tour, le professeur Lloyd confie l’un des ballons à vapeur à son petit fils Ray, surdoué de la mécanique, pour que ce dernier l’apporte au professeur Stephenson. Toutefois, cette pièce essentielle suscite de nombreuses convoitises, notamment celles de la fondation O’Hara…
Personnages
Hormis Ray qui est l’archétype du héros valeureux, il est difficile d’apposer une étiquette sur les autres personnages. L’approche manichéiste ne peut se concevoir ici tant les personnages ne sont ni bons, ni mauvais… ils sont tout simplement humains.
Ray est le jeune protagoniste de l’histoire. Il est le petit dernier de la famille Steam et voue la même passion que ses père et grand-père envers la science. Malgré son jeune âge, c’est un génie et son talent n’a rien à envier à celui de ses aînés. Il vit à Manchester avec sa mère et passe son temps à inventer diverses machines quand il ne travaille pas à l’usine du quartier. Du point de vue de sa personnalité, c’est un garçon innocent, empreint de doutes et tiraillé par les opinions divergentes des adultes qu’il côtoie.
Les professeurs Eddy et Lloyd sont respectivement le père et le grand-père de Ray. Ils ont tous deux construit la mystérieuse « Steam tower » mais ne s’entendent plus sur son usage depuis le grave accident qu’a subi Eddy lors d’une expérience. Ce dernier est désormais défiguré et privé de l’usage de son bras droit. Pour sa part, Lloyd ressemble à un vieux savant fou.
D’autres personnages sortent du cercle de la famille Steam tels le professeur Stephenson, ou encore Scarlett. Si le premier semble être un homme responsable et bienveillant, le second est une petite fille hautaine et méprisable, enfermée dans son monde bourgeois. Elle intervient en qualité de fille du président de la fondation O’Hara, investisseur de la « Steam Tower ». Cette fondation travaille en étroite collaboration avec Eddy et cherche à mettre la main sur le ballon à vapeur remis à Ray par son grand-père.
« L’homme est un loup pour l’homme »
Cette maxime issue du Léviathan de Hobbes résume tout à fait la portée de l’œuvre. Comme énoncé précédemment, les personnages ne sont ni bons, ni mauvais ; ils sont humains. Ainsi, l’œuvre d’Ôtomo prend tout son sens car bien qu’il n’y ait pas de véritable ennemi, il y a de violents conflits. Chaque personnage est mû par ses convictions, lesquelles se heurtent à celles des autres. Au premier plan, il y a la science et le paradoxe du progrès. La science doit profiter au bien-être de l’homme, mais force est d’admettre qu’au lieu d’apporter le progrès, elle apporte la cupidité et la destruction.
Pour appuyer sa pensée, Ôtomo a judicieusement choisi ses personnages. Ainsi, Ray symbolise l’innocence au centre de la folie des hommes, lesquels ne sont pas toujours ceux que l’on croit. Les personnages qui nous apparaissent comme les plus bienveillants ne sont pas forcément les plus dignes de confiance et inversement…
Conception
Sans être aussi riche que ne l’est celui d’Akira, le scénario de Steamboy est intéressant et bénéficie d’une certaine originalité, eu égard au contexte notamment. En effet, l’époque de l’Angleterre victorienne n’est pas souvent le théâtre de l’animation japonaise. En outre, bien qu’il s’agisse de science-fiction, Steamboy bénéficie d’un certain réalisme. Certes les inventions présentes peuvent sembler exubérantes voire anachroniques, mais tout repose néanmoins sur la même énergie qu’à l’époque : la vapeur. Cette donnée essentielle est bien respectée. Par ailleurs, les décors retranscrivent avec authenticité le Londres de l’avant seconde révolution industrielle.
Si les décors sont somptueux, l’animation l’est tout autant. C’est une véritable claque pour le spectateur tant l’animation est fluide. Le prix d’un tel rendu visuel : plus vingt millions de dollars. Tel est le budget alloué à Steamboy, ce qui est colossal pour un film d’animation.
La bande sonore relativement discrète est signée Steve Jablonsky. Ce dernier est davantage connu pour avoir composé des musiques de films telles Amityville, Pearl Harbor ou encore le remake de Massacre à la tronçonneuse ; Steamboy représente donc pour lui une première.
Conclusion
En définitive, Steamboy est une œuvre riche dotée d’une finition exceptionnelle. Toutefois, le choix de l’époque est à double tranchant : il pourra être boudé par certains et en combler d’autres.